Dès son annonce en mai 2005, Lost
Odyssey n'a pas tardé à devenir un jeu attendu. Attendu par des
centaines de milliers de gens comme une réponse de papa Sakaguchi à
ce qu'est devenue la licence culte dont il est le géniteur : Final Fantasy.
A savoir, un RPG simple d'accès et impressionnant. Espoirs récompensés
? Pari tenu ? Pourquoi pas
Froid, distant et
puissant. Ces adjectifs définissent parfaitement la psychologie de Kaïm.
Kaïm Argonar, un mercenaire immortel amnésique qui du haut de ses
milles années s'est forgé une carapace de tristesse, de remords
et de colère. Enclin à découvrir pourquoi ses souvenirs ne
sont plus, il va se retrouver embarqué dans une aventure aux côtés
de la jolie - immortelle et amnésique aussi - Satie Balmore. Les premiers
éléments de réponse quant à leur amnésie respective
semblent se situer aux abords du Grand Sceptre, une installation non loin de Uhra
qui puise l'énergie magique, celle qui alimente les plus grandes nations
développées du Monde. Une chasse aux souvenirs, un retour vers
le passé et une sauvegarde du futur, voilà en quelques mots comment
résumer le prochain parcours de notre ami Kaïm.
Les premiers instants de l'épopée nous flattent les yeux à coup de scènes cinématiques violentes et flamboyantes dignes d'un Braveheart du futur. Suite à
un combat contre une immense machine de guerre, Kaïm va être le témoin de l'écrasement d'une météorite sur le champ de bataille qui ravagera tout le monde, alliés
comme ennemis. Fidèle à son statut d'immortel, il en ressortira vivant à la grande surprise de certains renforts arrivés suite au cataclysme. Arrivé à Uhra, les
dirigeants demanderont à ce fabuleux survivant d'élucider le mystère qui entoure cette météorite, car plus que jamais, Kaïm semble être l'homme de la situation.
Comme tout RPG qui se respecte de nos jours, on attend de s'en prendre plein les mirettes sur tous les niveaux. Que ce soit pour le design des personnages, des ennemis ou encore pour les
décors. Hélas, la qualité n'est ici pas présente à tous les étages. Surtout en ce qui concerne le character design. Entre le joli cur aux fringues efféminées,
la princesse à la poitrine sur-gonflée ou le roi en armure dorée, on frôle le mauvais goût. De ce point de vue, Takehiko Inoue (Slam Dunk, Vagabond, etc. ) n'a pas excellé,
mais il faut avouer que certains héros, surtout les quatre principaux dont Kaïm bien sûr et Satie Balmore, ont un charisme fou. On regrette juste parfois que les personnages en 3D soient
ratés en gros plan, essentiellement en ce qui concerne les cheveux. La mèche de cheveux de notre immortel est au moins aussi rigide que les pans capillaires de Satie. Au sujet des personnages,
il est à proscrire de consulter la brochure du jeu, sous peine de se gâcher le plaisir de découvrir la troupe que l'on pourra amener jusqu'au quatrième disque que comporte le
jeu.
Toujours sur le chapitre de la technique, évoquons les graphismes
qui ont bénéficié de la technologie de l'Unreal Engine 3.
Ce moteur n'est pas d'une jeunesse extrême, mais suffisamment performant
pour retranscrire à l'écran un univers cohérent. Les divers
continents visités vont nous amener, pêle-mêle, dans des grottes
gelées, des bois aux teintes rougeâtres, le sommet de collines, des
cités souterraines ou encore de jolis villages perdus au beau milieu de
grandes plaines, où cascades et ruisseaux rythment la vie des habitants.
L'originalité n'est pas forcément de mise, mais on s'y plaît.
On notera ici et là des textures vraiment sommaires et des formes anguleuses
dans les plaines ou sur les rochers. Ce qui fait l'une
des forces majeures de Lost Odyssey, c'est son système de combat. Un jeu
au tour par tour bien connu des amateurs avec combats aléatoires. Bien
connu des amateurs, à ceci près qu'il y a là une notion de
barrière, la CG comme elle est appelée. Très simple à
mettre en place, elle consiste à placer des personnages sur la ligne avant
afin de réduire les dégâts potentiels des camarades sur la
ligne arrière. A régler dans l'inventaire, on peut même, si
le combat ne nous donne pas l'avantage, la régler en temps réel.
Inutile donc d'attendre le lynchage avant de reprendre au dernier point de sauvegarde
(ou check point). Toujours de l'ordre des réglages en temps réel,
il est possible avec Lost Odyssey de modifier l'équipement d'un héros
en plein combat. Un ennemi de feu vous prend d'assaut ? Pourquoi ne pas s'équiper
de l'anneau Adamantis afin d'infliger des dégâts supplémentaires
? Un système très souple et simple d'accès. Le groupe
de combattants est composé de mortels et donc d'immortels. Un immortel
succombant aux blessures d'un ennemi durant un combat revient à la vie
deux ou trois tours après, sans avoir besoin d'utiliser d'objet de soin.
Une notion à garder en tête afin d'éviter de perdre un tour
pour rien. Mais le plus important pour forger le personnage dont ont rêve,
avec les sorts et les compétences de son choix : les liens de compétences.
Grâce à leurs capacités d'apprentissage, les immortels peuvent
copier les compétences d'un mortel sous réserve que le maître
et l'élève soient dans le groupe au cours du combat. En engrangeant
les points de compétences, les compétences justement vont s'accumuler.
Cela permet de décupler les possibilités. Un héros dépourvu
de magies fortes ? On le lie à un mortel habile en mana et quelques combats
plus loin, l'immortel acquerra cette capacité. Ingénieux et agréable. Compte
tenu du fait qu'il s'agit d'un RPG japonais, les combats se manifestent de manière
aléatoire dans les donjons et lieux de quêtes. Si en soi, c'est un
principe connu pour ce type de jeu, ce qui l'est moins, ce sont les chargements,
parfois à rallonge, juste avant le combat. En effet, même si le loading
à proprement parler dure une dizaine de seconde, on suspecte les développeurs
de les avoir légèrement masqués en présentant pendant
une dizaine de secondes, supplémentaires, les combattants ainsi que l'arène.
Tant et si bien qu'il peut se passer parfois une demi-minute entre le déclenchement
du loading et la présence à l'écran des commandes d'action.
Parfois agaçant, surtout quand le combat dure près de quinze secondes.
On s'y fait. Une bonne chose néanmoins, le fait qu'il n'y ait pas de déplacements
à pied sur la carte du monde. On a tout simplement la carte qui se présente
lorsque l'on sort d'une zone, il suffit ensuite de sélectionner la destination,
avec en fond sonore, une musique réellement originale, à base de
flûte de pan, qui invite au voyage.
Sakaguchi,
une fois n'est pas coutume, s'est allié avec son acolyte de toujours pour
nous stimuler marteaux et enclumes. Nobuo Uematsu fait à nouveau merveille
avec ses compositions toujours en raccord avec l'événement. Successivement
tristes, enjouées mais éternellement inspirées, les musiques
collent brillamment à l'aventure et à l'ambiance que Sakaguchi s'est
efforcé de rendre. Cette collaboration n'est même pas, ou alors si
peu, mise en défaut par la version française. Les voix s'adaptent
avec une étonnante justesse aux personnages, si bien que les adeptes du
genre ne se sentiront pas forcés de revenir en version japonaise (ou anglaise
puisque les trois sont proposées). Très bon point. Pour
qui veut un jeu avec un challenge robuste et de longue haleine, Lost Odyssey se
présente comme un favori dans le domaine. Comparativement à Blue
Dragon, Enchanted
Arms ou encore Eternal
Sonata, sa durée de vie peut être doublée voire
triplée selon le degré de persévérance du joueur.
Car si l'histoire peut se terminer en une quarantaine d'heures sans sortir de
la quête principale, on peut y ajouter une vingtaine d'heures pour qui veut
découvrir tous les objets secrets, tous les sorts, reconstituer totalement
la mémoire de Kaïm grâce à des souvenirs qui se manifestent
à certains endroits du jeu. Il y a vraiment de quoi passer un agréable
moment en compagnie de cette équipe. La difficulté du titre
est toute relative car comme chacun sait, tout dépend du niveau de nos
personnages en fonction des situations. Et les situations à risques, ce
sont évidemment les boss. Certains d'entre eux très coriaces sont
de vraies barrières à la progression, à tel point que l'on
est parfois contrait de revenir en arrière pour augmenter légèrement
le niveau du groupe. Pour faciliter un peu les choses, on retrouve très
régulièrement des points de sauvegarde, mais le plus prudent, c'est
de toujours prévoir un stock assez conséquent de soins, on ne sait
jamais, certaines rencontres pouvant durer plus de trente minutes. Tenez-vous
le pour dit. Si l'on ne s'occupe pas des quêtes annexes, l'aventure
peut sembler linéaire et forcément, le sentiment d'être pris
par la main peut être pris comme un affront pour certains. Des points bleus
sur la carte nous indiquant toujours le prochain objectif. C'est pourquoi s'investir
dans les quêtes annexes est essentiel pour sortir de cette marche en avant
sans réelle recherche. Lost Odyssey sous son
aspect simple et linéaire restera dans les mémoires pour deux choses
: l'un des héros les plus classes de l'histoire du jeu vidéo et
le grand méchant le plus ridicule de notre loisir préféré.
Avec sa partie technique pas forcément toujours au meilleur niveau (saccades,
chargements, textures, etc.) sa durée de vie à la hauteur et une
aventure qui vous tient toujours en haleine, Lost Odyssey a ce petit quelque chose
qui fait qu'on l'aime. Le scénario, la musique, la qualité du doublage,
son système de combat et sa difficulté toujours très juste,
sont des points qu'il faut considérer dans la balance des décisions
d'achat. Ce n'est pas le plus grand des jeux, mais de grands moments vous y attendent.
Inspecteur Gadget - 28.04.2008
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