Après
s'être taillé une réputation en béton sur le net, Ninety-Nine
Nights (N3) devait convaincre son monde. Alors que sa sortie en Europe était
encore incertaine il y a deux mois, voici que ce titre débarque un petit
laps de temps après les Etats-Unis. En voilà une surprise
et quelle surprise
Ninety-Nine
Nights, c'est l'histoire de gens pas comme les autres qui vivent dans un monde
peuplé de gobelins et d'elfes où une guerre sans merci va bientôt
faire des ravages. Une guerre entre la lumière et les ténèbres,
le bien et le mal, le sacro-saint manichéisme dont on imagine dès
les premiers instants l'issue. L'avantage de N3, c'est que du fait du nombre de
personnages jouables et de leur appartenance à l'un ou l'autre des camps,
on pourra refaire l'histoire ou la vivre d'un point de vue différent. Au
total, sept personnages sont de la partie, dont les principaux, mais pas forcément
les plus charismatiques, sont forcement du côté lumineux de la force.
Ainsi, Inphyy, Aspharr et Myifee vous feront passer les premières heures
de jeu sur les terres de Vannvargenn. Tous les héros ont des liens plus
ou moins éloignés tout au long de leur aventure. Par exemple, Inphyy
croisera tôt ou tard Myifee sur son chemin afin de s'associer dans la lutte.
Si ce système peut s'avérer intéressant à première
vue, on regrettera vite que les alliés soient peu utiles. Inphyy et Aspharr
par exemple sont de force quasi équivalente dans leur campagne respective,
mais lorsque l'on se retrouve au côté de l'un d'eux, on s'étonne
de leur mollesse. S'ils parviennent à attaquer sans problèmes les
premiers venus, il leur faudra bien plus de temps pour remporter un combat que
si le joueur le manipule. Un bien pour un mal puisque cela nous permet d'enchaîner
les combos sans obstacles
En solitaire.
Adeptes
des Dynasty Warriors, N3 est pour vous. Beat'em all de l'extrême, il sera
question ici de trucider plusieurs milliers de gobelins, soldats et/ou elfes pour
des raisons parfois absurdes. Citons juste ce prêtre parti en guerre pour
tester sa foi
soit. On essayera donc de caser son cerveau dans un coin de
sa boîte crânienne pour y laisser la place à une infinie combinaison
de touches chromosomiques, X et Y.
Encore une fois, les paddles vont morfler.
Même si quelques subtilités sont présentes, c'est dans 99%
(ouh le jeu de mot
) des cas les touches X et Y qui seront sollicitées.
La touche B servira quant à elle à déclencher une attaque
de l'orbe lorsque la jauge sera remplie par les âmes des milliers de victimes
décimées. Une fois cette attaque lancée, les ennemis tués
vous rapporteront cette-fois ci des orbes bleues, autrement rouges, qui remplissent
une seconde jauge permettant par la suite une " orb sparks ", l'attaque
qui détruit un maximum d'ennemis dans les environs, excepté les
boss. Ce système de jauge à remplir apporte une petite touche de
stratégie puisqu'il faut savoir user de ces pouvoirs aux moments opportuns.
Le gameplay dégage une certaine rage, ne serait-ce que par la frénésie
qui nous immerge lorsque l'on martyrise la manette. On se surprendra même
à la tenir de façon différente. La paume gauche qui tient
fermement la manette et l'index droit raide comme du bambou qui tape sans relâche
les touches d'assaut afin d'esquisser un semblant de combo. On a vu plus subtil,
mais ça défoule.
Entre toutes ces batailles, on s'ennuie parfois
fermement. Les développeurs ont eu la lumineuse idée de ne pas permettre
aux personnages de se déplacer rapidement. Si l'envie se fait sentir de
prendre un peu de distance et d'aller explorer la carte pour trouver des objets
souvent d'importance, il faudra y aller
puis revenir. Ce qui peut occasionner
des trajets de cinq minutes à ne rien faire d'autre que de marcher entre
deux pressions de la gâchette droite permettant une petite glissade vers
l'avant. Assez embêtant pour un jeu où l'action devrait être
proche du non-stop.
L'une
des principales caractéristiques de N3 reste sans conteste la faculté
qu'a le moteur du jeu à afficher des centaines de personnages à
l'écran, avec quelques ralentissements, certes, mais rien de catastrophique.
Si les troupes ennemies impressionnent durant les premières confrontations,
on constate bien vite qu'elles sont surtout là pour nous ralentir plus
que pour nous rendre la tâche ardue. Hormis pour certains boss et sous-boss,
la difficulté du titre n'est guère présente et l'on remporte
sans grandes embûches chaque mission au premier essai. Quoiqu'il y ait toujours
ces moments fatidiques où l'on se retrouve face au boss du niveau avec
un minimum d'énergie après une bonne demi-heure de matraquage sans
fil. Dans ces cas-là, lorsque c'est l'adversaire qui donne le coup fatal,
il y a de quoi pester, et l'on repense aux erreurs que l'on a commises quelques
minutes auparavant.
L'intelligence artificielle de la population de Vannvargenn
est aussi élevée que la difficulté de N3, c'est à
dire très faible, voire trop. On remarque régulièrement des
pauvres gobelins coincés derrière des rochers pas plus hauts qu'un
pied, des alliés rester en groupe, loin de l'endroit où la bataille
fait rage, pire encore, des boss surpuissants qui ratent les trois-quarts de leurs
attaques. Le tout est si peu cohérent que l'on en rirait presque.
Côté
réalisation, c'est la rigolade aussi. Sous prétexte que sont affichés
des centaines de personnages à l'écran (tous identiques), les développeurs
ont cru bon de faire une régression technique. Mis à part la modélisation
des personnages principaux, on pourrait considérer que le reste est en
retard d'une génération. Les textures du sol désespérément
plates, artificiellement gonflées par quelques brindilles toutes moches,
les rochers taillés à la scie, du clipping à gogo maladroitement
dissimulé par une épaisse brume digne d'un jeu Nintendo 64. Si dans
le feu de l'action tout cela n'est aucunement gênant, on remarque surtout
ces tares lorsque l'on assiste aux scènes de transition entre les objectifs
d'une même mission. Les terrains de batailles sont de plus loin d'être
originaux, entre la plaine verdoyante, la montagne au ton orangée et les
terres glacées, les surprises ne nous guettent pas. Pour sauver un tantinet
ce déluge de défauts, les effets spéciaux occasionnés
par les attaques sont très agréables à l'il.
S'il
fallait trouver le défaut majeur de N3 au-delà de sa réalisation
technique, il serait sans doute question de l'ambiance. D'emblée, le scénario
ne brille pas par son ingéniosité, mais si en plus on y ajoute des
doublages anglais comiques avec des voix qui ne collent pas du tout, des dialogues
en plein combat sans intérêt et des scènes de transitions
d'une débilité ultime, on obtient ici l'un des jeux les plus marrants
de la Xbox 360. Il faut vraiment voir les personnages déambuler fiers d'eux
et sortir leurs tirades à deux balles pleines de bons sentiments pour le
croire. Et les doubleurs qui en font des tonnes n'arrangent rien à la donne,
au contraire, en essayant d'en faire trop, la synchronisation labiale en devient
bancale. Et pour parachever le tout, " ninety-nine nights ", que l'on
devrait traduire en français par " 99 nuits " est étrangement
transformé en " 99 lunes "
Une
bonne grosse déception, voilà qui résume bien Ninety-Nine
Nights. Son seul intérêt réside dans le fait qu'il soit défoulant
et c'est tout. On s'amusera facilement quelques heures avant que l'ennui se fasse
sentir lorsque l'on constatera le manque de travail sur ce titre. Que ce soit
sur l'ambiance, la qualité graphique, les doublages ou les finitions, on
écope d'un jeu à peine commercialisable. Une succession de bourdes
qui font de ce jeu très attendu la déception de la rentrée
2006.
Inspecteur Gadget -
03.09.2006