Ecrit
sous forme de roman en 1980 par l'Américain Robert Ludlum, La Mémoire
dans la Peau a dans un premier temps été adapté dans un téléfilm
en 1988, puis en 2002 par un film fort réussi de Doug Liman. Aujourd'hui,
Sierra nous propose l'adaptation en jeu-vidéo des aventures de Jason Bourne
grâce aux développeurs américains de High Moon Studios, à
qui l'on doit Darkwatch sur la première Xbox.
Le
jeu reprend les grandes lignes du film de Doug Liman et l'on suit ainsi notre
héros amnésique tentant de découvrir son passé tout
en échappant à la mystérieuse organisation Treadstone, en
allant de Marseille à Paris, en passant par Zurich et Vilnius. Les développeurs
ont eu la bonne idée d'introduire plusieurs séquences de flash-back
jouables. Celles-ci, absentes du film, auraient pu (et du) nous faire découvrir
d'avantage sur le passé de l'assassin que l'on dirige, mais hélas
le développement scénaristique de ces séquences se résume
trop souvent à : "voici votre cible, courez après puis éliminez-la".
Ce manque de consistance narrative se retrouve également dans le reste
du jeu, où même pour l'histoire principale tout le scénario
est résumé à la va-vite, et les transitions entre chaque
mission ne sont pas toujours très claires pour qui n'aurait pas vu le film.
La
mémoire dans la peau est un jeu d'action nerveux où quasiment aucun
moment de répit n'est présent. On apprécie cela ou pas, mais
force est de constater que grâce à une mise en scène réussie,
le joueur est constamment sous pression avec plusieurs séquences chronométrées,
que ce soit pour échapper à ses poursuivants ou alors pour ne pas
perdre la trace d'une cible. Même les courtes séquences cinématiques,
synonymes généralement de repos, sont ici interactives grâce
à l'utilisation de Quick Time Events, où l'on doit appuyer rapidement
sur la bonne touche montrée à l'écran sous peine d'échec.
Le reste de l'aventure est composé de deux principales phases d'action
: les combats au corps à corps et les phases de tir. Les combats à
mains nues, même s'ils sont perfectibles, sont réussis. Deux boutons
(X et Y) servent à donner des coups de poings, ou des coups de pieds en
appuyant plus longtemps. Quelques combos basiques sont également possibles.
Cette petite panoplie d'attaque est complétée par la garde (A) et
par les éliminations (B). Ces dernières ne sont utilisables qu'une
fois la jauge d'adrénaline remplie d'au moins un tiers. En lançant
une élimination, Jason Bourne peut mettre KO bon nombre des adversaires
de base en un coup, grâce à un mouvement violent et spectaculaire.
En fonction de l'endroit où se déroule cette élimination,
celle-ci peut être contextuelle, c'est-à-dire que notre héros
utilise les éléments de décor (chaise, tournevis, fenêtre,
coin de lavabo) pour faire subir plus de dégâts à ses ennemis
et rendre l'action très plaisante et visuellement attractive. Si Bourne
possède une jauge pleine au maximum et qu'il est entouré de plusieurs
ennemis, il peut même en éliminer jusqu'à trois à la
fois. Assurément l'aspect le plus réussi du jeu. On regrette cependant
pour ces phases de combat, des coups de pied pas toujours évidents à
sortir (pourquoi ne pas les avoir attribués à d'autres touches ?),
l'impossibilité de saisir des armes blanches (contrairement à certains
ennemis) et une répétitivité certaine surtout face aux ennemis
plus coriaces et aux boss (combo, garde, combo, garde, séquence QTE, élimination
et on recommence).
Les moments de tir,
presque autant fréquents que les phases de combat à mains nues,
ne sont malheureusement pas autant réussis. Comme dans bon nombre des titres
utilisant l'Unreal Engine et des jeux de tir actuellement, on retrouve l'utilisation
de couverture. Celle-ci se veut assez basique, sans franchissement d'obstacle
ou mouvement particulier. Le mouvement accroupi pose également problème
à certains moments où on ne peut curieusement pas rester dans cette
position. On apprécie cependant le fait que certains éléments
de décor soient destructibles. C'est au niveau de la visée que les
choses se gâtent, en raison d'un viseur minuscule et peu précis à
utiliser, et l'absence de zoom quelle que soit l'arme équipée. Sachant
que les ennemis peuvent encaisser de nombreuses balles sans broncher, il faut
par conséquent rechercher les headshots pour s'en sortir sans trop d'encombres.
Mis à part les phases de combat, on trouve quelques trop rares séquences
de discrétion (le terme infiltration serait abusé) où l'on
peut éliminer un ennemi par derrière en un coup et un niveau au
volant d'une Mini-Cooper à Paris, où la conduite très arcade
ne convainc pas.
Une fois l'aventure
terminée, soit après 6-7 heures de jeu, il ne reste plus grand chose
à faire, puisque La Mémoire dans la Peau ne propose aucun mode multijoueur.
On trouve cependant dans les menus la possibilité de rejouer les combats
de boss, de voir des esquisses de conception, de visualiser les cinématiques
et d'écouter les musiques. Hélas pour accéder à ce
contenu "bonus" plutôt sommaire, il est nécessaire d'avoir
découvert tous les passeports cachés du niveau en question, chose
pas forcément évidente, et qui n'est pas une raison suffisamment
motivante pour se replonger dans cette aventure très linéaire et
répétitive.
La réalisation
du jeu n'éblouit jamais, mais s'en sort plutôt bien sur l'ensemble
grâce en partie à des animations de qualité et des niveaux
plaisants à parcourir, même si, encore une fois, la linéarité
et les couloirs sont très présents. Les personnages principaux,
tels que Bourne et Marie ne sont pas modélisés à partir des
vrais acteurs et manquent quelque peu de charisme en comparaison. Les musiques,
composées en partie de mixages de la bande son du
film, sont convaincantes et soutiennent bien l'action. On retrouve avec plaisir
le doubleur français de Matt Damon, les autres voix par contre sont en
retrait et les dialogues souvent assez simplistes.
La
Mémoire dans la Peau, le jeu, est une adaptation correcte du film. L'idée
de proposer des séquences flash-back était bonne, mais il est bien
dommage que les développeurs n'aient pas profité de cela pour nous
faire découvrir plus en détails le passé et les motivations
de Jason Bourne. Même constat pour le reste de l'aventure qui, malgré
une bonne mise en scène, des musiques de qualité et des décors
soignés, manque de liant scénaristique. Les scènes d'action
s'enchaînent avec efficacité, mais on aurait aimé des moments
d'enquête et peut-être un peu plus de finesse par moment. Les combats
au corps à corps sont intenses et réussis, en grande partie grâce
aux éliminations contextuelles. On regrette par contre les phases de tir
peu convaincantes, et le fait que l'aventure soit linéaire, courte et répétitive.
Max73
- 05.07.2008