Loin des Resident
Evil et autre Silent Hill, Project
Zero a su imposer son style. On ne joue pas ici dans le registre du
gore ou de l'horreur mais dans celui de la peur, la peur du noir et celle des
esprits. Annoncé sur Xbox durant l'E3 2004 alors que la version Playstation
2 venait à peine de sortir, ce Survival Horror développé
par Tecmo bénéficie grâce à ce portage de nombreux
bonus qui lui valent d'ailleurs la mention de Director's Cut. Si
dans le premier épisode le joueur incarnait la jeune et frêle Miku
Hinazaki partie à la recherche de son frère, Project Zero 2 nous
propose un scénario nettement plus évolué où les fantômes
jouent un rôle important et où il est question de parallèles
entre générations. Cette fois, l'héroïne se prénomme
Mio et si la petite ballade qu'elle effectuait avec sa sur Mayu se déroulait
on ne peut mieux, il se passera rapidement quelque chose que les deux jumelles
n'imaginaient pas un seul instant. En effet, ce pèlerinage aux abords de
leur maison d'enfance, qui sera bientôt submergée par la construction
d'un barrage voisin, se soldera par une apparition imprévue. C'est pour
commencer Mayu qui, comme guidée, suivra un papillon écarlate qui
s'enfonce dans la forêt épaisse. Mio s'étant assoupie, constate
à son réveil que sa soeur a disparu. Un petit coup d'il vers
la pénombre forestière la laissera entr'apercevoir la silhouette
de Mayu. S'en suit alors un trajet le long d'un sentier de terre bordé
d'arbres peu rassurants, dépourvus de feuilles. La nuit est tombée.
Au bout du chemin, sur un terrain où les flambeaux et les pierres commémoratives
se font nombreuses, Mayu se tient debout. A ses côtés virevoltent
des centaines de papillons écarlates qui soudainement vont disparaître.
D'un mouvement lent elle se tourne vers vous et laisse transparaître sur
son visage comme une once de tristesse. Elle regardait en bas de la colline, le
village de Tous Les Dieux
Un village mystérieux dont on ne revient
pas
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L'aventure se déroule donc dans un lieu à
l'atmosphère lourde, un village où à chaque pas, la peur
s'intensifie. Ici, hormis les deux jumelles et un petit garçon emprisonné,
vous ne verrez que des fantômes, des esprits bien décidés
à profiter de la gémellité des surs Amakura. Comble
du hasard, les jumeaux ont joué un rôle très important dans
les coutumes et légendes de cette cité abandonnée. Les esprits
ne tarderont alors pas à vous prendre pour la réincarnation de Yae
et Sae, les dernières jumelles ayant existé à Tous Les Dieux,
tandis que les quiproquos se feront nombreux, pour vous comme pour eux.
La
particularité des Project Zero (Fatal Frame au Japon et aux Etats-Unis)
vient du fait que les combats se jouent à la première personne,
à la manière d'un FPS, avec pour seule arme un appareil photo. Capable
de capturer les esprits ou de révéler des choses invisibles à
l'il nu, cet appareil dit Noir, évolue tout au long de l'aventure.
Dans un premier temps, seules des pellicules de faible qualité seront disponibles
à l'intérieur des bâtisses causant beaucoup moins de dégâts
et rapportant peu de pouvoir spirituel, une sorte de monnaie permettant de modifier
votre appareil. Par la suite, vous découvrirez d'autres types de pellicule
dont la plus puissante, et la moins répandue cela va de soit, porte le
nom de Type Zero. A utiliser à bon escient.
En outre, l'optimisation
de l'appareil noir pourra aussi se faire par le type de lentilles. Au départ
une seule est disponible. Les suivantes, superposables, possèdent des pouvoirs
offensifs ou défensifs permettant entre autres de ralentir un esprit trop
collant ou de déclencher une grosse prise de vue. A tout cela, il faut
combiner la possibilité d'effectuer des " cadrages fatals ".
Ils ne peuvent être déclenchés qu'à certains moments,
en général le plus proche du visage du spectre (si tant est qu'il
en possède un
). En résulte alors un effet bénéfique
pour votre jauge spirituelle, alors que le fantôme se retrouve à
l'autre bout du couloir, avec son énergie qui s'égraine.
Dans
Project Zero 2 il y a deux grandes catégories de fantômes, les néfastes
et les non-violents. Ceux qui vous veulent du mal et ceux qui vous narguent. On
les repère tout de suite grâce au filament de l'appareil photo (affiché
en bas de l'écran). Lorsqu'il devient rouge, le combat s'approche tandis
que s'il vire au bleu, il faut vite dégainer l'appareil pour prendre une
photo avant que l'esprit ne s'échappe. Il faut également garder
à
l'esprit qu'il ne sert à rien de fuir les confrontations
car de par leur composition, les fantômes ne sont pas arrêtés
par les murs ou de simples portes. La tension monte rapidement.
Les combats
restent, malgré la maîtrise ardue de l'appareil, assez jouissifs
grâce à la sensation d'évolution et aux effets accompagnant
vos plus beaux clichés. Il n'empêche que l'on pestera souvent lorsque
les fantômes sont en nombre, pas plus de trois à la fois. Il est
alors quasiment impossible de sen sortir sans perdre deux ou trois herbes médicinales.
Heureusement, celles-ci sont nombreuses et en items de soin on découvrira
aussi l'eau bénite et la pierre miroir. Grâce à cela, il est
rare de tomber face à l'écran Game Over, tout du moins en mode normal.
En mode difficile ou cauchemar (mode bonus) c'est une autre histoire.
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Une fois l'aventure finie, après
une bonne douzaine d'heures de jeu, de nombreux bonus s'offrent aux joueurs qui
voudraient replonger fièrement à Tous Les Dieux. D'une part, on
peut recommencer la partie avec les statistiques acquises lors de la première
partie tout en conservant les bonus de soins et autres objets et d'autre part,
grâce au classement obtenu en fin de jeu on obtient un nombre de point permettant
d'acheter des goodies inutiles mais forcément indispensables. On pourra
alors refaire l'aventure en bikini rose ou en Yukata de différentes sortes
(vêtement traditionnel japonais) tout en portant des lunettes. Ajoutons
à cela la possibilité d'acheter des galeries d'images, des vidéos
promotionnelles et pourquoi pas, pour les plus fainéants d'entre nous,
se procurer les trois autres fins du jeu (elles sont chères) ? Ce système
de récompense est plutôt sympathique et si l'on veut tout découvrir,
il faudra se relancer au moins une seconde fois dans l'aventure. Et on y retourne
volontiers.
L'adaptation tirée de la Playstation 2 se
fait forcement ressentir au niveau graphique. L'ambiance se prête
bien à cet univers obscure où votre lampe torche fait des miracles,
le portage des ombres est sublime, le design est joli mais
le tout manque cruellement de relief : les planchés sont désespérément
plats, au même titre que les lambris apposés sur les murs ou que
les ruelles gravillonnées. Le bump-mapping aurait pu faire des merveilles.
Cela dit, ce n'est pas un réel défaut pour ce jeu car le style des
maisons japonaises est très bien retranscrit et le tout est rudement immersif
notamment grâce au Dolby Digital. Car si graphiquement on ne voit pas d'améliorations
(il y en aurait d'après Tecmo) la différence se ressent aux niveaux
de l'ouïe. Les fantômes qui se plaignent dans votre dos alors que vous
assénez le coup fatal à celui qui vous fait face tout en entendant
le parquet grincer est une expérience terrifiante. Les passages dans le
cimetière ou sur le pont alors qu'un lac s'étend à perte
de vue le sont tout autant. Merci aux bruits de fond et la légère
brise qui s'engouffrent dans vos enceintes satellites. La candeur de Mio, sa démarche
joyeuse et son physique plaisant autorisent quelques moments de répit,
une fois à l'abri des esprits.
On notera enfin une grosse bourde sur
la jaquette du jeu qui annonce " voix en japonais " alors qu'elles sont
bien anglaises; même en cherchant dans les menus, rien ne nous propose l'alternative.
Vraiment dommage, surtout pour un jeu à l'ambiance si asiatique.
Côté
technique, on apprécie la disparition des ralentissements visibles dans
le premier épisode ainsi que la quasi-absence de chargements durant le
jeu. L'écran de loading ne se présente qu'à l'entrée
des bâtiments, une fois dedans, on ne quitte plus Mio des yeux, on l'accompagne
alors dans sa progression vers l'inconnue sans arrêts.
Project
Zero 2 : Crimson Butterfly parvient à se hisser dans le haut du tableau
des Survival Horror, il n'entre pas en concurrence avec les Silent Hill ou les
Resident Evil, il les complète. C'est un jeu qui plaira sans aucun doute
aux personnes appréciant de se faire peur. Si les graphismes ne font pas
honneur à la Xbox, Project Zero 2 fera honneur à votre ludothèque.
Un scénario complet, des rebondissements, des sensations fortes, une durée
de vie acceptable couplés à une rejouabilité certaine font
rapidement oublier le seul défaut de ce jeu, à savoir des graphismes
sommaires. On savourera certainement Project Zero 3 sur la prochaine génération
de machines, avec des environnements hautement réalistes. En attendant
que cela se produise, ruez-vous sur ce jeu, ce grand jeu.
Inspecteur
Gadget - 25.02.05